Avec
l'industrialisation de la musique enregistrée, les grandes surfaces
étaient devenues les premiers revendeurs de disques devant les
disquaires, décimés dans les années 1990. Mais aujourd'hui, les grandes
surfaces se retirent progressivement du marché, et délaissent la
musique en ligne auxquelles elles ne croient plus. Changement d'époque.
Vous ne le saviez probablement pas, mais le distributeur E. Leclerc
avait lancé en 2006 un service de musique en ligne baptisé
MusicEtMoi,
sans aucune conviction. Malgré des tarifs plus bas que la concurrence,
avec notamment un forfait d'écoute illimitée à 7,99 euros par mois,
MusicEtMoi n'a
jamais gagné en popularité. Il faut dire que E. Leclerc n'a jamais
véritablement communiqué autour de sa plateforme, comme s'il savait
déjà depuis le lancement que l'effort serait vain.
Depuis le 8 août, les internautes n'ont plus la possibilité de
créditer leur compte, et les renouvellements automatiques pour les
abonnements sont interrompus. Le 8 septembre, la plateforme sera
défintivement fermée, sans que ça ne provoque sans doute l'émotion
populaire.
En théorie, les clients du service de E. Leclerc qui ont acheté des morceaux protégés par des DRM sur
MusicEtMoi.comne pourront plus obtenir les licences d'autorisation pour lire les
chansons achetées, une fois les serveurs fermés. Mais pour éviter le
fiasco subi par MSN ou Yahoo qui sont obligés de
conseiller à leurs clients de contourner les DRM,
la continuité du service sera assurée par Nokia, sur
music.nokia.fr.
Musiqueetmoi était en effet opéré par la société OD2 créée par Peter Gabriel, rachetée par Loudeye, lui-même racheté par le finlandais
Nokia l'an dernier.
Au delà de l'anecdote, le retrait de E. Leclerc de la musique en
ligne est symptomatique d'un retrait général de la grande distribution
de la vente de musique tout court. Les linéaires consacrés aux CD se
sont déjà considérablement réduits ces dernières années dans les
grandes surfaces, et sont désormais la plupart du temps relégués dans
le fond des magasins. Leur place est aujourd'hui occupée par les jeux
vidéo et les produits électroniques, intrinsèquement plus rentables que
les disques aux marges faibles.
Les grandes et moyennes surfaces (GMS) qui s'étaient imposées dans
les années 1990 comme le premier réseau de vente de musique, devant les
disquaires, sont en train de réduire la place des disques comme peau de
chagrin. Les ventes baissent donc mécaniquement, ce qui incite les GMS
à réduire leurs linéaires encore davantage. Bien avant le piratage,
c'est ce cercle vicieux industriel qui est responsable de la chute des
ventes de disques ces dix dernières années.
En un an, entre mai 2007 et mai 2008, les ventes de musique dans les
grandes surfaces ont baissé de près de 32 %. Dans le même temps, les
disquaires comme la Fnac ou les magasins Virgin accusent une baisse
beaucoup plus modérée de 13 % des ventes, ce qui leur permet désormais
de prendre près de la moitié du marché, devant les grandes surfaces
alimentaires. Mais ces grandes surfaces spécialisées, elles aussi,
diminuent l'exposition des disques. Il suffit de se rendre dans une
Fnac pour constater que les disques sont la plupart du temps relégués à
l'arrière du magasin ou à l'étage, au profit des baladeurs MP3, des
appareils photos, des DVD ou des livres, beaucoup mieux exposés.
Source :
http://www.numerama.com/magazine/10428-La-grande-distribution-abandonne-la-musique.html